La broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) est traditionnellement décrite comme une maladie respiratoire, mais sa réalité clinique est bien plus large. Bien sûr, la dyspnée et la rééducation respiratoire restent au cœur de la prise en charge. Cependant, au fil des années, les recherches ont montré que ses effets dépassent largement les poumons : elle a aussi un impact profond sur la fonction musculaire.
Perte de force, fonte musculaire, limitation de l’endurance… ces symptômes contribuent à la limitation des activités quotidiennes, à la baisse d’autonomie et à l’aggravation du pronostic. Autrement dit, la faiblesse musculaire n’est pas un simple symptôme secondaire : elle fait partie intégrante de la pathologie. C’est pourquoi la réadaptation respiratoire moderne ne peut plus se résumer à des exercices ventilatoires. Elle doit intégrer systématiquement l’évaluation et le suivi de la force musculaire. Pourtant, la quantification de la force musculaire reste encore peu systématique dans la pratique clinique.
Dans cet article, on vous explique l’importance d’évaluer la force musculaire chez les patients BPCO. Pourquoi la faiblesse musculaire est un enjeu majeur chez ces patients, quels muscles doivent être mesurés en priorité, quels tests de force sont fiables et adaptés en cabinet, et surtout, comment la quantification de la force transforme le suivi patient et l’efficacité des programmes de rééducation.
CONTENTS :
1- BPCO et faiblesse musculaire : une réalité sous-estimée
2- Quadriceps et préhension : des indicateurs cliniques majeurs
3- Les tests de force les plus fiables en cabinet
4- Lever les freins à l’évaluation musculaire
5- Suivi patient : pourquoi la quantification change tout
6- À retenir
7- FAQ : évaluation de la Force Musculaire et BPCO
8- Conclusion
9- Références
1- BPCO et faiblesse musculaire : une réalité sous-estimée
Chez les patients atteints de BPCO, les atteintes musculaires périphériques sont fréquentes… mais encore trop souvent sous-diagnostiquées. Pourtant, leur impact est majeur.
La dyspnée, l’inflammation chronique, la corticothérapie et surtout la sédentarité induite par la maladie entraînent progressivement une fonte musculaire, en particulier au niveau des membres inférieurs. Le quadriceps fémoral est l’un des premiers muscles touchés. Cette faiblesse n’est pas anodine : elle influence directement la capacité à marcher, à monter des escaliers, à être autonome.
Plusieurs études ont mis en évidence l’ampleur du phénomène :
- D’après Shrikrishna et al. (2012), l’inactivité physique chez les patients BPCO est fortement corrélée à l’atrophie du quadriceps, contribuant à une spirale de désentraînement et de perte fonctionnelle.
- Shah et al. (2019) ont quantifié une réduction moyenne de 28 % de la force du quadriceps chez les patients BPCO, comparé à des sujets sains.
Autrement dit, la faiblesse musculaire n’est pas une conséquence tardive, c’est un marqueur précoce et modifiable de l’aggravation de la BPCO. C’est pourquoi son évaluation régulière devrait faire partie intégrante de la prise en charge.
2- Quadriceps et préhension : des indicateurs cliniques majeurs
Chez les patients atteints de BPCO, la perte de force musculaire, en particulier au niveau des quadriceps et de la main, n’est pas seulement un symptôme. C’est un indicateur clinique de première importance.
Quadriceps : un prédicteur de pronostic
Au-delà de son rôle fonctionnel, la force du quadriceps est directement corrélée à la mortalité et à l’évolution de la maladie (Shrikrishna D et al., 2012). Elle entre notamment en ligne de compte dans l’indice BODE, qui combine IMC, obstruction bronchique, dyspnée et endurance à l’effort pour prédire le risque vital.
💡 Qu’est-ce que c’est l’indice BODE ? L’indice BODE est un indice multidimensionnel conçu pour évaluer le risque clinique d’exacerbation et de mortalité chez les personnes atteintes de cette pathologie. Il permet également de définir, à l’aide du Volume Expiratoire Maximal en un Seconde (VEMS) et du périmètre de marche, la gravité de la pathologie. Certains items de cet indice peuvent parfois être difficiles à mesurer ou nécessitent des équipements.
Les recommandations récentes insistent sur l’intérêt de mesurer cette force pour :
- détecter précocement le désentraînement sévère,
- individualiser les objectifs de réentraînement,
- et suivre l’impact des interventions thérapeutiques.
Force de préhension : un test simple, mais puissant
Moins connue en réadaptation respiratoire, la force de préhension gagne pourtant en reconnaissance. Elle est aujourd’hui considérée comme un marqueur global de force et de santé musculaire, avec un lien démontré avec :
- le risque de sarcopénie,
- la morbidité cardiovasculaire,
- et la mortalité, y compris chez les patients BPCO (Jeong et al., 2017).
Sa simplicité en fait un outil de dépistage de choix, même en consultation ou en visite à domicile.
3- Les tests de force les plus fiables en cabinet
L’évaluation de la force musculaire n’est plus réservée aux laboratoires ou aux centres hospitaliers. Aujourd’hui, des tests simples, validés et reproductibles permettent de mesurer la force en cabinet, en quelques minutes seulement.
Le test de force du quadriceps
Le plus souvent utilisé en réadaptation respiratoire, le test de force du quadriceps se réalise en contraction isométrique : le patient pousse contre une résistance fixe, sans mouvement articulaire. L’idéal est d’utiliser un dynamomètre portable, placé à la cheville, en position assise (genou fléchi à 90°).
Ce test présente de nombreux atouts :
- Fiabilité élevée, même entre différents praticiens,
- Sensibilité au changement, idéale pour suivre l’évolution au fil des séances,
- Sécurité : test peu fatigant, même chez des patients fragiles ou très déconditionnés.
Des valeurs de référence sont disponibles pour interpréter les résultats en fonction de l’âge, du sexe et du contexte clinique (Shah S, et al. 2019).
Cette évaluation est d’autant plus pertinente lorsqu’elle est réalisée à l’aide de dynamomètres connectés, reconnus comme instruments de référence pour mesurer la force et la puissance musculaire de manière fiable (Shrikrishna et al., 2012).
💡 Le dynamomètre de traction K-Pull de Kinvent, portable et connecté, est parfaitement adapté à cette mesure. Placé à la cheville ou sur un point fixe, il permet de quantifier avec précision la force isométrique du quadriceps. Son couplage avec l’application Kinvent offre une lecture instantanée des résultats, un suivi objectif des progrès et une intégration fluide dans les bilans patients.
La dynamométrie de préhension
Encore plus simple à mettre en œuvre, le test de préhension consiste à mesurer la force maximale développée par la main dominante en serrant un dynamomètre de préhension. Ce test a l’avantage d’être :
- ultra rapide (quelques secondes),
- non invasif,
- adapté à tous les profils de patients, même très déconditionnés.
Il est particulièrement utile en première intention, pour repérer une faiblesse musculaire globale, ou comme complément au test du quadriceps. Il permet aussi de dépister une sarcopénie selon les critères du Groupe de travail européen sur la sarcopénie (EWGSOP).
D’après Saey et al. (2021), la dynamométrie connectée est aujourd’hui l’outil de référence pour l’évaluation de la fonction musculaire, que ce soit pour les membres inférieurs (quadriceps) ou la force de préhension (grip strength).
💡 Le dynamomètre de préhension K-Grip s’inscrit parfaitement dans cette approche : ce dynamomètre connecté, précis et portable permet une mesure rapide et fiable de la force de préhension. Couplé à l’application Kinvent, il offre un suivi automatisé, une visualisation des progrès en temps réel et une traçabilité facilitée pour les praticiens.
4- Lever les freins à l’évaluation musculaire
Malgré leur utilité démontrée, les tests de force musculaire sont encore trop peu utilisés en réadaptation respiratoire de ville. Pourquoi ? Les freins sont multiples, mais souvent surmontables.
Frein n°1 : « Je n’ai pas le bon matériel »
Longtemps, l’évaluation musculaire a été associée à des dispositifs encombrants ou réservés aux plateaux techniques hospitaliers. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas : des dynamomètres portables, précis et faciles à utiliser sont disponibles à un coût abordable, avec des interfaces numériques qui facilitent l’interprétation et le suivi.
Frein n°2 : « Je manque de temps en consultation »
La réalité du terrain est claire : les séances sont courtes, et les priorités nombreuses. Mais la bonne nouvelle, c’est que :
- Le test de grip prend moins d’une minute,
- Le test isométrique des quadriceps peut s’intégrer facilement à une séance de renforcement,
- Et les outils numériques permettent de gagner du temps sur l’analyse et le reporting.
L’évaluation peut donc s’insérer naturellement dans votre routine clinique, sans alourdir le parcours de soin.
Frein n°3 : « Je ne sais pas interpréter les résultats »
Là aussi, des ressources existent : grilles de valeurs de référence, seuils cliniques validés, modules de formation… Le praticien peut s’appuyer sur des repères simples pour identifier une faiblesse significative, suivre l’évolution du patient, ou savoir quand réévaluer.
5- Suivi patient : pourquoi la quantification change tout
Évaluer la force musculaire une fois, c’est utile. Mais la suivre dans le temps, c’est là que l’impact devient clinique. La quantification offre une véritable valeur ajoutée dans la prise en charge des patients atteints de BPCO.
Objectiver les progrès (ou les stagnations)
Sans mesure, difficile de dire si le protocole fonctionne. En chiffrant les performances (ex. : +15 % de force quadriceps en 6 semaines), le kinésithérapeute peut :
- adapter l’intensité du programme,
- justifier une réévaluation des objectifs,
- mieux argumenter auprès du patient ou du prescripteur.
C’est aussi un moyen de détecter rapidement un plateau, voire une dégradation, malgré le suivi. Dans la BPCO, cette vigilance est cruciale : une baisse de force quadriceps ou de grip peut signaler un risque accru d’exacerbation, de chute ou de perte d’autonomie. Suivre régulièrement la force permet donc non seulement d’évaluer les progrès, mais aussi de prévenir une décompensation fonctionnelle.
Renforcer l’adhésion du patient
Le simple fait de visualiser ses progrès est extrêmement motivant pour le patient. C’est un levier précieux dans des pathologies chroniques où l’engagement dans le soin peut s’émousser. Les résultats chiffrés rendent les bénéfices concrets : « Avant, je ne pouvais pas me lever sans les bras. Maintenant, je pousse plus fort qu’au début ! »
Créer un langage commun avec les autres professionnels
Un suivi chiffré facilite le partage d’informations avec les prescripteurs, médecins ou autres kinés en relais. Cela renforce la cohérence du parcours de soins et contribue à mieux valoriser l’impact de la kinésithérapie dans des pathologies lourdes comme la BPCO.
💡Grâce aux outils numériques comme l’application Kinvent, les tests de force réalisés avec les capteurs Kinvent (quadriceps ou grip) sont automatiquement :
- enregistrés,
- historisés,
- et présentés sous forme de graphiques clairs et lisibles.
Ces données chiffrées offrent de véritables leviers cliniques. Elles permettent de :
- identifier les patients les plus à risque de développer des formes sévères de BPCO ou des exacerbations,
- intervenir précocement sur les facteurs aggravants par des ajustements de mode de vie ou des programmes thérapeutiques ciblés (European Respiratory Journal, 2012),
- bâtir un programme d’exercices individualisé, adapté aux capacités réelles du patient.
Pour le kinésithérapeute, cela se traduit par un gain de temps et une meilleure traçabilité : les bilans sont exportables, les courbes de progression visibles en quelques secondes, et l’engagement du patient renforcé grâce à un suivi lisible, séance après séance. La fonction MyKinvent permet de prolonger ce suivi au-delà du cabinet, en donnant un accès sécurisé aux données et aux résultats de tests non seulement au patient, mais aussi au médecin prescripteur. Elle facilite également la communication en permettant :
- la programmation de rendez-vous,
- l’envoi de questionnaires et de scores d’auto-évaluation (PROMs),
- et le partage des données cliniques de manière fluide et instantanée.
Le tout dans un environnement conforme aux exigences du RGPD, garantissant la protection des données personnelles de chaque utilisateur.
6- À retenir
- La BPCO s’accompagne d’une faiblesse musculaire périphérique majeure, en particulier au niveau des quadriceps et de la force de préhension.
- Ces indicateurs sont liés à la mortalité, au risque de sarcopénie, à l’inactivité et à l’évolution fonctionnelle de la maladie.
- Des tests simples, fiables et validés existent pour les évaluer en cabinet : dynamométrie isométrique pour les quadriceps et le grip.
- Les freins à l’évaluation musculaire (manque de matériel, de temps ou de repères) peuvent être levés grâce à des outils modernes, portables et faciles d’usage.
- L’application Kinvent permet un suivi digitalisé, rapide et visuel, qui renforce l’adhésion du patient et optimise le raisonnement clinique.
- Quantifier la force musculaire dans le temps permet d’objectiver les progrès, de personnaliser les protocoles et de renforcer la coordination pluridisciplinaire.
7- FAQ : évaluation de la force musculaire et BPCO
Quels tests de force sont les plus adaptés en réadaptation respiratoire ?
Les plus pertinents sont :
- Le test isométrique des quadriceps (assis ou couché, avec dynamomètre),
- Le test de force de préhension (grip strength) avec dynamomètre manuel.
Ces tests sont simples, rapides à réaliser et validés dans la littérature scientifique.
À quelle fréquence faut-il tester la force musculaire ?
Idéalement au début du programme, puis à intervalles réguliers : toutes les 4 à 6 semaines pour ajuster les objectifs. En suivi long terme, une évaluation trimestrielle permet de mesurer la progression ou la stabilité.
Est-ce qu’un dynamomètre manuel suffit ?
Oui, un dynamomètre peut suffire s’il est fiable et calibré. Les versions numériques (comme celles de Kinvent) offrent l’avantage d’un suivi automatisé et graphique via une application dédiée.
En quoi la force de préhension est-elle utile chez les patients BPCO ?
La force de grip est un marqueur global de santé musculaire. Elle est corrélée à la sarcopénie, au risque de chute, aux complications cardiovasculaires et à la mortalité dans plusieurs études. Chez les patients BPCO, elle donne une information précieuse, rapide à obtenir.
Est-ce que les patients adhèrent bien à ce type de test ?
Oui, la majorité des patients apprécient de pouvoir visualiser leurs progrès. Les tests sont peu fatigants et bien acceptés, même chez des patients fragiles. Cela favorise l’implication dans le programme.
8- Conclusion
Dans le contexte de la BPCO, évaluer la force musculaire n’est plus un « plus », c’est une nécessité. La faiblesse des quadriceps ou de la force de préhension n’est pas qu’un symptôme périphérique : c’est un indicateur majeur de l’état fonctionnel, du risque de complications et du pronostic global.
Bonne nouvelle : aujourd’hui, il est possible de tester facilement et rapidement ces paramètres en cabinet, grâce à des outils simples, portables, validés scientifiquement et désormais connectés. L’application Kinvent, associée aux capteurs Kinvent, facilite ce suivi et libère du temps clinique.
Réintégrer la quantification de la force dans les bilans et le suivi des patients BPCO, c’est mieux comprendre leurs besoins, mieux adapter les soins, et mieux valoriser l’impact de votre pratique.
9- Références
- HAS : Comment mettre en œuvre la réhabilitation respiratoire pour les patients ayant une bronchopneumopathie chronique obstructive ?
- Saey D, Bellocq A, Gephine S, Lino A, Reychler G, Villiot-Danger E. Quels tests physiques pour quels objectifs en réadaptation respiratoire ? Revue des Maladies Respiratoires. 1 juin 2021 ;38(6) :646–63.
- Ramalho SHR. Lung function and cardiovascular disease: a link. Trends Cardiovasc Med. 2021.
- La Réadaptation Cardiaque – Phase 2, FÉDÉRATION FRANÇAISE DE CARDIOLOGIE
- Houssière A. L’index BODE : révélateur de l’intérêt de l’évaluation de la dysfonction musculaire chez le BPCO. 2010.
- Hamilton AC. Muscle strength, symptom intensity, and exercise capacity in patients with cardiorespiratory disorders. Am J Respir Crit care Med. 1995.
- Maltais F. Dysfonction musculaire périphérique dans la BPCO. Rev Mal Respir. 2022.
- Shah S, Darekar B, Salvi S, Kowale A. Quadriceps strength in patients with chronic obstructive pulmonary disease. Lung India. oct 2019;36(5):417–21.
- Shrikrishna D, Patel M, Tanner RJ, Seymour JM, Connolly BA, Puthucheary ZA, et al. Quadriceps wasting and physical inactivity in patients with COPD. European Respiratory Journal. 1 nov 2012;40(5):1115–22.
- Jeong M, Kang HK, Song P, Park HK, Jung H, Lee SS, et al. Hand grip strength in patients with chronic obstructive pulmonary disease. Int J Chron Obstruct Pulmon Dis. 2017;12:2385–90.
- Holland A. The BODE Index. Journal of Physiotherapy. 1 janv 2010;56(1):62.